mardi 9 avril 2013

Ville close de Franck Maubert.

Salut les loupiots,

Aujourd’hui, petit article sur un roman des plus déroutants :

Ville close de Franck Maubert.

Un homme se retire à Richelieu, dans la maison de sa tante défunte, dont il fut, plus jeune, l'amant. Le narrateur découvre peu à peu les étranges habitants de cette ancienne « ville nouvelle », aujourd'hui enserrée dans ses murailles. Entre Touraine et Poitou, cette ville close fondée en 1642 par le Cardinal, dont le fantôme hante encore les rues désertées, est le théâtre de faits divers troublants : suicides, rumeurs, morts suspectes, meurtres...
Le narrateur va se fondre au coeur des mystères des lieux et enquêter, à la recherche de l'âme de la ville et du spleen qui l'habite, jusqu'à ce que, lui-même confronté au drame, soit sauvé par une énigmatique jeune femme.
Un roman d'atmosphère assurément, inspiré de faits réels.
Julien Collardeau est un critique gastronomique mis sur le banc de touche, relégué aux viandes froides, joli terme désignant la rubrique nécrologique. Suite à ce changement de carrière forcé il décide de quitter Paris et d’aller s’installer à Richelieu, ville sombre et loin de tout où il possède une maison léguée par sa tante Micol.

Après son arrivée il découvre une flopée de personnages intrigants qui semblent tous plus ou moins liés. Plusieurs meurtres ont eu lieu ces dernières années sans que le ou les coupables ne soient jamais écroués. De plus, certaines personnes reçoivent des lettres de menaces écrites avec des lettres découpées dans des journaux, lettres à la prose très élégante parsemées de salope et autres joyeusetés.

Cette série de meurtres, qui pourraient avoir l’air d’être le centre de l’histoire ne l’est néanmoins pas du tout à mon sens. J’ai plutôt ressenti ce roman comme une chronique d’une ville oubliée, j’ai vraiment eu l’impression de me retrouver dans un huit-clos sombre et mélancolique.

La mélancolie, voici le sentiment avec lequel je ressors de cette lecture que j’ai appréciée par sa singularité.

Le livre est parsemé de chapitres plutôt courts qui relatent des instants de la vie de Richelieu, fondateur de cette petite ville, à travers la lecture d’une très vieille biographie lue par notre héros. Ces chapitres pourraient sembler inintéressants ou sortis de nulle part mais moi j’ai apprécié ces petites touches d’Histoire qui nous apportent des connaissances en plus sur ce lieu si important.

La vie doit-elle se soumettre aux lois inflexibles de la symétrie ? J’espère que non pour celle des hommes. Celle du cardinal, sa politique aussi, sans aucun doute, illustrent la dureté, l’harmonie et l’ordre. Ici, sa présence est partout perceptible. Présent et absent, à la fois, sous chaque pierre. Et chaque pierre étouffe, un peu plus chaque jour, la vie de chacun des habitants de la ville. Ce lieu est un témoin, un conservatoire idéal pour un architecte des monuments historiques ou pour un historien. A voir. Même eux l’ont délaissé et n’en font guère cas dans leur – nombreux – ouvrages consacrés au cardinal. Ils pourraient pourtant s’amuser à déchiffrer chaque symbole et donner un sens à ce projet de pharaon. Il y a fort à faire. Mais, dès son achèvement, ce lieu a toujours semblé à l’abandon. Et ce qui fut considéré, ce qui fut pensé comme une ville idéale par ses architectes et son concepteur, n’est resté en fait qu’une forteresse au milieu d’un marécage. Richelieu n’a d’autre raison d’exister que celle de n’avoir pas été détruite.

Pour en revenir aux personnages, ils m’ont tous semblé très.. perturbants. Tous ont l’air de portés de lourds secrets, de lourds non-dits et de cacher de grandes choses. J’aurais aimé en apprendre plus. L’auteur ouvre des portes, des détails qui révèlent des petites choses mais on ne nous dit rien et j’ai trouvé cela un peu frustrant.

J’ai lu quelques critiques qui trouvaient dérangeant de ne rien savoir à propos du passé du personnage principal, Julien. Étonnement cela ne m’a pas plus touchée que ça, il ne me semble pas devoir connaître le passé d’un homme pour pouvoir apprécier son présent.

Ces meurtres, dont l’un se passe à peine deux jours avant l’arrivée de Julien, apportent encore une touche plus étrange à cette ville où l’on sent des ombres derrière chaque fenêtre. L’endroit semble presque éteint, il m’a semblé pouvoir y entendre le silence. Les rues y sont constamment désertes, les habitants renfermés sur eux-même. J’ai eu un sentiment de microcosme retiré du monde, abandonné de tous.

J'ai aimé le style de l'auteur qui m'a fait pensé à de vieux romans policiers français. Cette ambiance ajoutée à son écriture et j'avais l'impression de me retrouver dans un vieux Maigret que ma mère regardait quand j'étais enfant. Je me souviens de ce malaise persistant, exactement comme dans ce livre.

Dans la maison, j’entends le goutte-à-goutte à peine perceptible d’un robinet, et peut-être aussi le grattement d’un loir, sous le comble. J’ai beau tendre l’oreille, chercher un son, le silence s’étend, toujours plus difficile à percer. Ce silence exprime la mesure du proche et du lointain. Cette nuit, on ne décèle même pas le roulis d’un camion. Tout ce silence et ce vide ne m’étonne plus. J’essaie de donner des formes à ce silence, dans l’attente qu’il se referme. Je ne sais ni qui je suis, ni ce que je fais ici. Je ne me sens ni jeune, ni vieux. Sans âge. Le froid se glisse par les interstices des fenêtres, et lorsque je m’approche, les vitres se couvrent de buée.

En bref, j’ai aimé ce roman par son ambiance où l’air semble constamment brumeux et les gens tous plus ou moins suspects. J’ai aimé cette ville seule et abandonnée. J’ai été intriguée et je regrette que certaines choses n’aient pas été plus aboutie, notamment la fin qui semble un peu bâclée par sa rapidité. Une bonne découverte malgré cela.

Découverte dont je remercie les Editions Ecriture!

Des bisous !

1 commentaire:

  1. J'ai bien apprécié l'ambiance de ce roman aussi. C'est particulier hein? Un peu pesant, comme si quelqu'un était là tapi dans l'ombre et observait tout... Une fin un peu précipitée oui aussi sans doute.
    Je n'ai pas non plus été gênée par le fait de ne rien savoir du passé du critique... enfin je ne crois pas...
    Bel avis Lavinia

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